Trois semaines déjà que nous sommes au Portugal : c’est plus qu’il nous reste à y passer. Nous ne sommes pas encore sortis de la région d’Alentejo (la plus grande du pays).

Beauté simple des villages. Habitants interloqués par la performance des enfants («  Desde França, tudo em bicicleta ? »). Royaume du chène-liège et des oliviers. Très bon pain (contrairement à celui d’Espagne) cuit dans des maisons que rien ne distingue des autres habitations du village.

En réalité, si, nous avons fait une infidélité à l’Alentejo : nous sommes allés passer deux jours à Lisbonne, en train. Séjour bien trop court, évidemment, mais qui a déjà donné aux petits et aux grands l’envie de revenir. C’est à Lisbonne que nous avons dit au revoir au Tage, devenu bien plus grand que celui que nous avions vu la première fois à Aranjuez, début septembre. La célèbre tour de Bélem, construite à l’origine pour défendre le port de Lisbonne, a servi ensuite a bien d’autres usages : prison, place forte pour le prélèvement d’une taxe aux bateaux qui empruntaient le Tage, résidence du capitaine du port. Elle a même changé de place. Bâtie au milieu du fleuve, elle se trouve maintenant à quelques mètres de la plage. L’énorme tremblement de terre de 1755 est passé par là, en changeant le lit du Tage. 

Brève leçon d’histoire devant l’imposant monument aux navigateurs, qui, à partir du 15° siècle découvrir les côtes d’Afrique puis la route des Indes, avant de partir pour le nouveau monde et d’y conquérir le Brésil.

Cours d’histoire plus récente devant le monument des anciens combattants. Liste interminable des soldats morts entre 1961 et 1975, lors des guerres de décolonisation en Angola et au Mozambique, ultimes vestiges de l’empire portugais.

Au château Sao Jorge, nous avons une belle vue sur les collines de Lisbonne et au loin, nous admirons la silhouette du pont Vasco da Gama, géant de 18 kilomètres de long qui franchit la « mer de paille » (le Tage). Il est si long que les ingénieurs ont dû tenir compte de la courbure de l’écorce terrestre dans leurs calculs ! Le pont plus ancien, que nous avons emprunté en train (la voie a d’ailleurs été suspendue sous la chaussée il y a  dix ans) est un superbe pont suspendu qui n’a sans doute rien à envier au Golden Gate Bridge de San Francisco (Alice, notre grande voyage,  confirme : elle était en Californie il y a quelques semaines encore). Après avoir porté le nom de Salazar, l’ancien homme fort du Portugal, ce pont a été rebaptisé pont du 25 avril (1974), en l’honneur de la révolution des œillets. A propos de régime politique, le Portugal a fêté ce 5 octobre les 99 ans de la République. Une bonne raison donc pour nous de revenir ici dans un an (on aime bien les comptes ronds). Le Portugal fut le troisième pays d’Europe à se constituer en République. Toujours à propos de politique : le pays est en pleine période électorale. Après les législatives du 27 septembre (victoire du Parti Socialiste), c’est aujourd’hui les élections municipales ainsi que celles pour les communautés de communes. C’est l’occasion d’une campagne très vivante avec rassemblements des membres du même parti, défilés de voiture avec sono à fond, distribution de gadgets (les enfants ont maintenant chacun leur petit sac frappé du symbole du PSD).

A ce propos d’élections, nous organisons un grand jeu-concours : une carte postale gratuite pour celui ou celle qui le premier nous donnera su r le blog le nom du nouveau maire du village où nous sommes aujourd’hui (Colos, qui fait partie de la « Camara municipal » de Odemira, en Alentejo, bien sûr). Si c’est l’actuel qui est réélu, on peut vous dire qu’il est très sympa : il nous a permis de disposer pendant trois jours de la salle des fêtes de la commune, qui sert aussi de garage aux voitures de la croix-rouge, de la Guarda Nacional Republicana et à celles de la commune. A vos claviers et dépêchez-vous, seul le premier gagnera une carte !

 

Revenons-en à Lisbonne, pour vous dire qu’on a aussi visité le « Parc des Nacions », quartier nouveau sorti de terre à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1998. Dans le superbe Océanarium, nous avons pu voir cet être bizarre qu’est le poisson-lune.

Après notre excursion à la capitale, nous revenons à Evora, principale ville du Alto Alentejo.  Cette ville, classée au patrimoine mondialk de l’Unesco, nous retiendra prisonniers pendant une semaine. Arpenter ses rues, piétonnes pour la plupart, visiter la maison de Vasco da Gama, fréquenter l’Université créée en 1550, où les azulejos (carreaux de faïence à dominante bleue) tapissent les murs des salles de classe, voir les étudiants fraîchement diplômés arborer leurs longues capes noires tapissées d’écussons brodés, tout cela nous a captivé. Le camping, avec l’ombre de ses eucalyptus, sa piscine, son tennis, sa salle Wifi (pour recevoir vos messages, nourrir le blog, et envoyer au CNED les devoirs de Clara) a fait le reste. Une semaine sans vélo, c’était difficile, mais on a survécu !

 

Nos seules « Portugalères » chères à Delphine :

-une nuit à Arraiolos (au nord d’ Evora), que nous passâmes dans nos tentes, dressées à la hâte et à la nuit tombée, derrière un grand bâtiment municipal. Les gendarmes nous avaient pourtant bien dit qu’il était impossible de rester en ville, qu’il nous fallait aller jusqu’au camping  d’Evora, mais 25 bornes avant la nuit, c’était mission impossible. On s’installe donc en chuchotant, histoire de ne pas être remarqués par les voisins. Nos tentes sombres, bien cachées dans l’ombre du bâtiment, sont presque invisibles… jusqu’à ce que les lampadaires de la rue voisine braquent leur lumière dessus. Encore un dîner sans réchaud (pain, confiture) et au lit. Des phares braqués sur nous vers trois heures du matin me font craindre une visite des gendarmes, mais ce n’est qu’un camion qui prend la route. Quand le jour se lève, vers 7 heures, la partie est gagnée. S’ils exigent qu’on libère les lieux, même pas mal !

 

-une nuit dans le « balneario » près d’un lac, que le maire du village d’Odivelas nous avait présenté comme un endroit idyllique. Il s’agissait en fait des sanitaires, passablement décrépits, où nous dûmes dîner, assis entre les urinoirs et les douches, dans un doux parfum de pissotières bouchées, à côté de la cabane du gardien des lieux et de ses trois copains qui ne nous avaient pas attendus pour boire quelques bières : vers 18 heures, une grande poubelle était déjà remplie de cadavres de Sagres (LA bière portugaise) et de bouteilles de vin vidées dans l’après-midi. La moustache de Pascal avait rapidement permis d’engager la conversation, car un des buveurs était aussi pourvu d’une belle « bigote ». Une des soirées les plus marrantes du voyage, passée à tourner notre inconfort (relatif d’ailleurs, car la pluie nous a fait apprécié le toît de tôle au-dessus de nos têtes) en dérision, et à rigoler chaque fois que l’autre moustachu se mettait à hurler de rire avec ses potes de bouteille.

 

-une matinée sous la pluie (les enfants comprennent que lorsqu’on se rapproche de l’Atlantique, le risque de se mouiller augmente ; leçon de géographie sur le terrain) pas très froide de ce début d’automne. Avantage d’arriver mouillés en ville : on fait pitié et les gens se plient en quatre pour nous trouver un logement !

 

Mais à côté de ces petites galères, combien de beaux moments :

-deux jours sur une piste cyclable tracée sur une ancienne voie de chemin de fer, au nord d’Evora

-une nuit magique, à côté d’un grand cromlech (95 menhirs plantés en forme d’ovale de 60 mètres sur 30) sur une colline dominant la plaine d’Evora, avec la pleine lune pour parfaire le tableau. Datant de  7 000 ans avant J.C., il s’agit d’une des plus vieilles constructions humaines de la planète. Encore une occasion pour Joachim d’appréhender le programme d’histoire de 6°.

-l’accueil de José et Mariana , à Alcaçovas. Non contents de nous héberger dans une grande salle communale avec électricité et douches, ils nous apportent une délicieuse soupe aux épinards qui disparaît vite dans nos sept ventres et nous offrent ticheurtes et casquettes à l’effigie de leur ville.

-l’attention qui nous est portée dans les villages. Souvent surpris qu’on parle (un peu) portugais, ils veulent en savoir plus sur notre voyage et questionnent les enfants. Zoé, par son jeune âge (nove anos) impressionne tout le monde. C’est une vraie mascotte !

 

Désolés, pas de poux et de nuit à massacrer des télés à la pleine lune, cette fois. On sombre un peu dans la facilité, je vous l’accorde. Mais promis, on va lutter contre l’embourgeoisement qui nous guette. Quoiqu’en Algarve, région  touristique au sud du pays, ça risque d’être difficile…