Nous sommes maintenant dans le Nord… (de l’Espagne, rassurez-vous) où nous avons trouvé la pluie. Ca fait rire  les enfants car c’est comme dans le film des Ch’tis : dès qu’on quitte l’Andalousie, rideau de pluie. Une raison de plus pour nous faire regretter le sud de l’Espagne. Avant de quitter la péninsule ibérique et après le départ d’Alice, un coup d’œil dans le rétroviseur s’impose.

 

Notre mois andalou ne nous laisse que de bons souvenirs.  Si cette région, ou plutôt communauté autonome, comme on dit en Espagne,  a su nous charmer, c’est grâce à ses nombreux atouts :

 

Ses villes regorgeant d’art, d’histoire, de culture. Et encore, redoutant de ne plus pouvoir partir, nous avons choisi de ne pas visiter Córdoba, la ville d’Anne et Claire (comprenne qui pourra). Sevilla comme Granada nous ont charmés, malgré notre peu de goût pour les endroits touristiques. Les bâtiments où les différentes civilisations se superposent, se mélangent,  ont un attrait auquel parents et enfants ont été très sensibles.

 

Le climat n’est pas non plus étranger au charme andalou. Durant tout le mois de novembre, nous n’avons enfilé l’imper qu’une seule fois, pendant quelques minutes, …un nuage égaré. Là-bas dans le Sud, nous ne savions même plus ce qu’était un nuage. Il faut quand même dire que nous avons particulièrement bien choisi notre année : certains nous ont dit que ça fait 40 ans qu’il n’avait  pas plu en novembre !

 

Le dépaysement procuré par le travail dans les orangeraies ou les oliveraies.

 

Les rencontres faites dans certains endroits qui sont déjà devenus mythiques pour nous, comme :

-la « Venta Mauro », petit bar-restau où les gérants nous ont reçus comme des rois. Ils attendent déjà que Joachim vienne faire un stage de cuisine chez eux.

 

-chez Anja, où les enfants ont pu travailler, se baigner dans la piscine et jouer avec les chiens, pendant que Laurence et Alice taillaient les orangers.

 

-Marinaleda, village complètement atypique où les journaliers du secteur agricole, souvent exploités par un système de propriétés quasiment féodales se sont organisés en coopératives et ont réussi à ce que des terres leur soient données en concession. Un exemple à petite échelle de la réforme agraire qui n’a jamais été faite en Andalousie. Nous avons passé trois jours dans le gymnase dont la municipalité nous avait confié les clefs sans même nous demander notre identité. Les responsables de l’exploitation agricole ont pris le temps de nous la faire visiter. Le « maestro » du moulin à huile nous a même fait pénétrer dans son antre. Le parfum de l’huile d’olive en cours de fabrication n’est pas prêt de nous quitter. Les enfants ont profité de ces jours de repos pour … faire du vélo d’appartement. Il y en avait une dizaine dans le gymnase. Maël a même réussi à pédaler sur deux vélos  à la fois ! Nous avons rendu visite aux élèves de l’école primaire et à ceux du collège, où la classe était décimée par la grippe. Nos enfants ont passé une soirée à jouer au basket avec les jeunes de Marinaleda. Comme presque partout en Espagne, le « polideportivo » (gymnase) est le lieu de réunion des jeunes du village. Ce n’est peut-être pas un hasard si les Espagnols ont un bon niveau international dans de nombreux sports…

-La voie verte du « train de l’huile ». 100 km sans voiture, sur des pentes ne dépassant pas 3%, dans une mer d’oliviers. Cette piste suit le tracé d’une voie de chemin de fer ouverte à la fin du XIXème siècle sur laquelle circulait le train collectant les olives. Oliviers à perte de vue dont les rangées escaladent les collines. Terre entre les arbres ratissée comme un jardin japonais car il faut pouvoir y poser facilement les filets où tomberont les olives. Cette voie longe les premières reliefs de la Sierra Nevada, mais nous n’avions que les avantages de la montagne, pas les routes pentues. Un régal. 

 

-Les profs du lycée français de Séville, Sarah et Sandra, qui nous ont fait découvrir « leur » ville et nous ont invité au bar et au restau. Le tour fait dans la vraie Séville, celle où les touristes ne vont pas restera un des grands moments du voyage.

 

-Le village de Lantejuela où un conseiller municipal est venu nous ouvrir les sanitaires du « camping » et n’ a pas hésité à déranger un employé communal pour qu’il rebranche l’électricité.

 

-Noupi, un petit serpent très gentil rencontré sur la route, qui a mordu le fond du cuissard de Maël et a causé quelques frayeurs à Alice.

 

-La découverte du flamenco, même  si Zoé est déçue de n’avoir pas vu de danses sévillanes. C’est surtout lors des férias qu’on peut en voir, et la saison est terminée (une raison de plus pour revenir…).

 

Voici quelques-uns de  nos meilleurs moments andalous. Mais il y en eut bien d’autres, si bien qu’à peine partis, nous songeons déjà à retourner là-bas. Malgré tout, il nous semble que nous aurions pu mieux connaître encore mieux cette région et ses habitants. L’Andalousie vaut un an de voyage à elle seule, mais nous avons choisi de connaître aussi d’autres régions du sud de l’Europe. Il a donc bien fallu se résoudre à partir. Difficile de faire des choix…

 

Nous nous accordons en ce moment une pause à Aranjuez, où, chose bizarre, c’est l’automne. Les feuilles tombent, les matins sont frisquets. Nous prévoyons une expédition à Madrid pour équiper Garonne-Danube en vêtements chauds. L’Andalousie nous avait fait oublier l’hiver, mais celui-ci va peut-être nous rattraper en Sardaigne.

 

L’ambiance familiale est toujours bonne. Trois mois que nous sommes ensemble jour et nuit. Assez peu de périodes vraiment houleuses jusqu’à maintenant, même s’il y des « frottages de caractères » fréquents, comme dans la vie ordinaire. Nous avons toujours tous envie de continuer l’aventure. Laurence et Pascal se plaignent parfois de la lourdeur du « semi-remorque » qu’ils ont la charge de conduire. Une équipe de six personnes (et même sept lors des deux derniers mois) a une certaine inertie, au démarrage, au freinage et même à l’arrêt. Paradoxalement, c’est plus lors des périodes où ne nous roulons pas que nous remarquons la taille imposante du véhicule. Nous avons encore pu l’expérimenter cette semaine à Jaén et Granada. Quand nous roulons, nous sommes autonomes pour le logement, l’alimentation, le transport, le garage. Alors que quand nous visitons une ville, il faut anticiper pour trouver où dormir (camping sauvage impossible), où manger (restau trop cher), comment se déplacer (personnes et vélos), où laisser nos « véhicules » qui ne peuvent pas prendre le bus et ne sont acceptés que dans un nombre de trains assez restreint. C’est pour cela que notre équipe nous semble plus lourde à traîner en ville que dans la campagne. C’est d’ailleurs tout à fait logique : Vous avez déjà essayé de faire monter un semi-remorque à l’Alhambra, vous ? Le coût des séjours en ville est lui aussi assez prohibitif : le prix de la place de parking pour un semi-remorque en centre-ville est impressionnant !!!

 Nous avons donc dû choisir récemment entre Córdoba et Granada, deux des trois joyaux andalous. C’est Granada qui a gagné, grâce à l’atout de la montagne. « Sierra Nevada, c’est comme notre voiture » a remarqué Zoé. Et vu qu’on reviendra (bientôt ?) vers Séville pour amener Joachim en stage « bistrot », on visitera Cordoue à cette occasion : ce sera sur la route. Maël a regretté de ne pas voir la fameuse mosquée de Cordoue , mais Clara s’est réjouie de pouvoir se rendre à Grenade sur les traces de Federico Garcia Lorca que Mme Dansou et Monsieur Cadet lui avaient fait découvrir l’année dernière au collège.

Les chauffeurs du « semi-remorque » ont donc toujours des choix à faire, de nombreuses décisions à prendre chaque jour. C’est parfois fatigant, ça fait souvent douter, voire regretter un choix. Mais jusqu’à présent, nos décisions n’ont pas été si mauvaises que ça : le véhicule est encore en parfait état et démarre bien. On craint quand même pour les démarrages matinaux quand le temps va se rafraîchir….

Nous apprécions tous énormément nos quelques jours de pause ici, à Aranjuez. Plus besoin de chercher chaque soir où dormir, où garer le semi-remorque. Pause, mais pas repos, car les enfants font leur travail scolaire, sous la conduite de Pascal, et Laurence travaille au jardin pour « payer » le logement qu’Ana et Juanpa nous fournissent. Finalement, du vrai repos à ne rien faire, nous n’en avons jamais. Et dire que certains nous croient en vacances…

Nous sommes en voyage, mais c’est pas du voyage « prêt à consommer », messieurs dames. C’est un voyage artisanal, cousu main, sur-mesure, c’est pas d’la m…….. . Ca prend du temps et de l’énergie, mais c’est du haut de gamme ! Même si on ne se repose jamais, on prend chaque jour conscience de notre chance et on redoute déjà de retrouver la routine dans sept mois.

 

Bon, voici donc nos états d’âme  actuels. Cela est sans doute moins rigolo pour vous que les épisodes du genre « Papi Bordeaux » (notre estomac se réjouit d’ailleurs de ne pas le retrouver tous les soirs, celui-là), mais c’est important pour nous de vous faire partager cet aspect de notre aventure. Nous sommes déjà au tiers du voyage. Le chapitre « péninsule ibérique » sera bientôt terminé. Un bilan s’imposait donc avant d’entamer le suivant. Il est très largement positif, pour toute l’équipe.

 

Iles et péninsule italiennes sont au programme du prochain chapitre. Nous commençons à nous plonger dans les livres d’italien.  Bon bain de langue en perspective pour tous et en particulier pour Clara qui l’a choisi comme troisième langue au lycée.

 

Dans une semaine, nous serons dans un ferry qui nous conduira vers Porto-Torres, au nord de la Sardaigne. Juste avant, nous aurons passé un week-end à Barcelone avec trois familles du Comminges (ou ex-commingeoise), et pas les plus tristes à fréquenter… A bientôt pour la suite.