Quatre petites semaines pour traverser l’Espagne d’une droite presque rectiligne Nord-Est  -  Sud-Ouest. Déjà, le Portugal se jette sous nos roues ! Une nouvelle langue à se mettre en bouche. Facile à lire, plus difficile à comprendre et à parler, mais une nouvelle et excitante aventure.

L’Espagne ne nous laisse que de bons souvenirs. L’accueil dans les villages, les grands espaces qui nous ont souvent donné l’impression d’avoir traversé par erreur l’Atlantique. Le climat s’est même adouci  pour mieux nous laisser profiter d’une température plus propice au pédalage. Afin de nous donner moins de regrets de quitter la terre espagnole, la pluie a même arrosé notre dernier jour de route.

 

Depuis nos dernières nouvelles, nous avons :

-visité Toledo, superbe ville au passé impressionnant : capitale de l’empire wisigoth, ville impériale sous Charles Quint, richissime au temps de la conquête du Nouveau Monde, capitale de l’Espagne avant d’être supplantée par Madrid. Pendant la visite d’un des synagogues de l’important quartier juif, Joachim travaille un chapitre important du programme d’histoire de 6° : les Hébreux.

-passé une nuit superbe dans le Pavellon de deportes (salle de sport) de la ville de Torrijos. Luis, le gardien, nous a même sorti 5 matelas, dont un double ! Apéro, télé, cuisinière, même la Wifi pour consulter vos messages et commentaires sur le blog !

-rencontré un contrôleur de la RENFE (SNCF espagnole) aux petits soins pour nous, qui nous a aidé à monter nos vélos et sacoches dans le train. Il demandait même aux voyageurs d’emprunter d’autres portes que celles devant laquelle on avait garé nos vélos. Chaque train ne prend normalement que trois vélos…

-amélioré notre record de jours sans douche : 5 !

-battu le record de la plus longue étape: 252 km, dont 250 en train !

-eu la visite de quelques habitants dans nos cheveux. Maël en a d’ailleurs profité pour faire couper les siens à la « peluqueria Lola », au village de Canaveral où nous avions mis le cap. (Sur celle-là, Patrick, je t’ai doublé, mais je suis sûr que tu peux faire mieux. Grâce à toi, les vannes vont fuser !)

-fait la connaissance d’ Abel, le simplet du village de Navas del Madrono. Après nous avoir offert à chacun une bouteille d’eau, il nous a invités à planter nos tentes dans le poulailler. Après avoir râtissé le terrain, nous recevons la visite de la mère d’Abel qui nous explique, désolée, qu’on ne peut camper là car le terrain à été loué à quelqu’un et qu’elle a déjà eu des problèmes avec cette personne. Elle est désolée « de toute son âme » et pour se faire pardonner, elle nous donne dix gros melons et pastèques. De quoi bien lester les sacoches.

Après d’autres recherches dans le village, (entre autres, au couvent Santa Clara) nous plantons les tentes au bord du terrain de foot, sous la protection conjointe de la Guardia Civil (gendarmerie) et de la police municipale. Ils font même une ronde vers trois heures du matin pour voir si tout va bien. On a connu la Guardia Civil moins aimable, dans d’autres temps.

-mis en route le compteur des chutes, grâce à Zoé. Rien de grave, juste un genou bien raboté. La véritable victime de cette chute fut Maël. En effet, Zoé ayant du mal a pédaler, Pascal dut la remorquer, et la carriole fut donc attelée au véhicule de Maël, ce qui, dans une étape de montagnes russes, ne fut pas vraiment à son goût. Pour plaire à son frère, Zoé a vite réparé son genou et la remorque a repris sa place naturelle, derrière Pascal.  

-dormi à côté du cloîrte d’Alcantara, ville frontière avec le Portugal, qui eut son heure de gloire entre el XVI° et le XVIII°. Napoléon en son temps eut la même idée que nous : il utilisa le couvent comme quartier général, après sa campagne d’Espagne, pour aller conquérir le Portugal. Notre invasion sera plus pacifique et passera sans doute plus inaperçue !

-passé notre plus belle nuit du voyage, aux dires des enfants. Agustin, le maire du village de Membrio, nous avit proposé de dormir dans une chapelle en construction, en nous prévenant bien que le sol n’était pas carrelé. Bien sûr, des baroudeurs comme nous ne s’arrêtent pas à ça ! « Pas de problème, senor, on a des petits matelas ! ». En effet, pas de carrelage, le sol n’était même pas plat, terre battue jonchée de morceaux de briques, de restes de fer à béton, de tessons de bouteille… Pas l’idéal pour poser nos matelas, mais au moins, nous avions un toît, et l’orage pouvait bien gronder, même pas peur ! Heureusement, les ouvriers avaient pris le soin de laisser les palettes sur le chantier,  ce qui nous permit de réaliser un superbe parquet flottant, que nous recouvrîmes par endroits de briques plates du plus bel effet.  Nous avions la plate-forme pour construire l’abri anti-araignée (tente sans son double-toît). La décharge voisine nous offrit même deux matelas pour améliorer encore le confort de notre logis, qui approchait alors la perfection. D’ailleurs, dormir sur de vieux matelas ne nous faisait même pas peur, nous les avions déjà, les poux. Le clou de la fête fut l’expédition des enfants dans la décharge, où ils réussirent à fracasser cinq télés, chaque massacre étant annoncé par les cris de Zoé ! La dernière victime tomba  même sous les coups assénés grâce à un magnum de champagne, qui explosa en même temps. Malgré tout ça, pas la moindre coupure à déplorer parmi la marmaille ! Il faut dire qu’on avait pris nos précautions, en baptisant la chapelle du nom de San Justo, lu sur l’étiquette de la bouteille de Rioja bue la veille au soir !

-roulé pour la première fois sous la pluie et avec un fort vent de face. Juste de quoi tester l’étanchéité du matériel (impeccable).et le temps sec est revenu. La sécheresse est d’ailleurs un temps de saison : ça fait dix mois qu’il n’est pas tombé une goutte !

-accueilli un nouveau membre dans l’équipe de Garonne-Danube : notre nièce Alice, que de nombreux Barthains connaissent, qui va faire avec nous jusqu’à Barcelone.

-eu la joie de rouler sans bagages, qui ont trouvé place dans la voiture de Caroline, la maman d’Alice.et sœur de Laurence. Heureusement que ça ne dure que quelques jours : on y prendrait vite goût. Les mauvaises langues diront encore : « Oh, oh, oh les tricheurs… »

 

 

Nous commençons à trouver notre rythme de croisière. Les jambes se musclent, les équipiers apprennent la patience quand il s’agit d’affronter une côte où de rouler sous la pluie, la peau des fesses se tanne, l’appétit est excellent. On peut même dire que manger devient une obsession. Chaque pause est l’occasion de tester les différentes marques de biscuits ou de pâtes de coing ( très populaire ici, comme d’ailleurs en Argentine, tiens, tiens). Le soir, c’est un kilo de pâtes que nous jetons dans la casserole, et il n’en reste pas beaucoup pour le pique-nique du lendemain ! 

 

Pour fêter notre arrivée au Portugal, à Montalvao, juste au sud du Tage, qui s’appelle ici Tejo, Maria nous a cuisiné un rôti de porc accompagné de frites, le tout après un excellent Porto. L’extase ! Maria a émigré en Bourgogne ( Nuits-Saint-Georges) en 1965. Elle y vit toujours, mais revient fréquemment ici depuis qu’elle est en retraite, pour s’occuper de sa mère et travailler dans son champ d’oliviers. Elle est heureuse de nous accueillir et de nous faire visiter son village. Une bonne introduction pour notre deuxième pays. Dans ce village, on ne peut pas faire 30 mètres sans qu'on nous parle français. A croire que tous les gens du village ont émigré entre Dijon et Beaune. Ils ont tous conservé des expressions bourguignonnes et même l'accent pour certains. Pascal n'est pas dépaysé. Le préfet de Côte-d'Or pourrait décider d'installer une ambassade sur place, car c'est sûrement ici qu'on trouve la plus grande concentration de Côte d'Oriens au monde!. Pascal est candidat au poste d'ambassadeur de Côte-d'Or à Montalvao.

 

Nous savourons chaque jour (certes, certains apprécient un peu moins que d’autres la pluie et le vent dans le nez ) notre bonheur de découvrir de nouvelles régions et de rencontrer de nouvelles personnes.

 

Vive la vie et  Hasta la vista !

 

PS :  Si vous connaissez des gens dans les régions que nous allons visiter, n’hésitez pas à nous donner leur adresse. C’est tellement bien, pour découvrir un pays, d’y être guidés.

Certes, on comprend bien qu’il soit, pour vous, risqué de nous mettre en contact avec vos amis. Mais rassurez-vous, même si nous avons parfois des moeurs  bizarres, nous savons aussi dormir sur des matelas qui ne sortent pas des décharges. Et question poux, nous ne sommes plus contagieux. Alors, n’hésitez plus...

PS le 3 octobre:

Nous venons de faire une longue pause, à Evora, puis à Lisbonne où nous sommes allés en train. Demain, on reprend le boulot (enfin, le guidon) pour rejoindre l'Algarve (côte Sud du Portugal). D'ici là, portez-vous bien...